Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions
l'émotion qui nous
étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici,
chez nous, dans Paris debout pour se libérer et
qui a su le faire de ses mains.
Non ! nous ne dissimulerons pas cette émotion
profonde et sacrée. Il y a là des minutes qui
dépassent chacune de nos pauvres vies.
Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris
martyrisé ! mais Paris libéré ! libéré par
lui-même, libéré par son peuple avec le concours
des armées de la France, avec l'appui et le
concours de la France tout entière, de la France
qui se bat, de la seule France, de la vraie
France, de la France éternelle.
Eh
bien ! puisque l'ennemi qui tenait Paris a
capitulé dans nos mains, la France rentre à
Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais
bien résolue. Elle y rentre, éclairée par
l'immense leçon, mais plus certaine que jamais,
de ses devoirs et de ses droits.
Je
dis d'abord de ses devoirs, et je les résumerai
tous en disant que, pour le moment, il s'agit de
devoirs de guerre. L'ennemi chancelle mais il
n'est pas encore battu. Il reste sur notre sol.
Il ne suffira même pas que nous l'ayons, avec le
concours de nos chers et admirables alliés,
chassé de chez nous pour que nous nous tenions
pour satisfaits après ce qui s'est passé. Nous
voulons entrer sur son territoire comme il se
doit, en vainqueurs.
C'est pour cela que l'avant-garde française est
entrée à Paris à coups de canon. C'est pour cela
que la grande armée française d'Italie a
débarqué dans le Midi ! et remonte rapidement la
vallée du Rhône. C'est pour cela que nos braves
et chères forces de l'intérieur vont s'armer
d'armes modernes. C'est pour cette revanche,
cette vengeance et cette justice, que nous
continuerons de nous battre jusqu'au dernier
jour, jusqu'au jour de la victoire totale et
complète.
Ce
devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici
et tous ceux qui nous entendent en France savent
qu'il exige l'unité nationale. Nous autres, qui
aurons vécu les plus grandes heures de notre
Histoire, nous n'avons pas à vouloir autre chose
que de nous montrer, jusqu'à la fin, dignes de
la France.